dimanche 24 février 2008

Manger sainement, renouer le lien avec sa nourriture, et préserver les terres fertiles : les bienfaits d'une agriculture localisée

Les Dossiers > Municipales 2008

Article rédigé par Isabelle Delannoy eco-echos.com pour Cap21

Les bienfaits d'une agriculture localisée

Manger sainement, renouer le lien avec sa nourriture, et préserver les terres fertiles : les bienfaits d'une agriculture localisée

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D'où proviennent les fruits, les légumes, la viande, les céréales... que nous posons chaque jour sur notre table ? Comment ont-ils été produits, transportés, à quel point étaient-ils mûrs quand ils ont été cueillis ? Nul autre secteur que celui de l'alimentation, ne parle davantage de filière qualité, de traçabilité. Mais en réalité, nous maîtrisons de moins en moins la qualité de notre nourriture, dont la production est de plus en plus délocalisée. Les communes peuvent agir pour le maintien et le développement d'une agriculture locale et de qualité.

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En Europe, 42 % des produits frais, légumes, fruits et céréales commercialisés présentent des résidus de pesticides, dont 5 % au delà des teneurs autorisées, selon une étude menée par la Commission européenne. Jusqu'à deux-tiers des fraises échantillonnées en contiennent, plus d'une pomme et plus d'une laitue sur deux. Les aliments pour bébé, malgré la législation très stricte dont ils font l'objet, ne sont pas épargnés : 8,7% d'entre eux contiennent des résidus et 2.7% d'échantillons dépassent même les limites maximales autorisées !

Poussés à force d'engrais et de pesticides, les fruits et les légumes sont moins concentrés en matières nutritives. Il semblerait que leur composition elle-même soit modifiée. Plusieurs études ont montré que des fruits cultivés selon les règles de l'agriculture biologique -sans engrais ni pesticide chimiques- produisaient davantage d'antioxydants -ces molécules qui protègeraient du vieillissement et du cancer - que les mêmes fruits poussés de façon conventionnelle.

Aujourd'hui, les fruits et légumes que nous mangeons viennent de loin, surtout en hiver. 30 % de ceux consommés par les Européens à la saison froide viennent du sud de l'Espagne, d'Almeria. En plein désert, sous des milliers d'hectares de bâche plastique, les tomates, concombres, poivrons, courgettes, etc. poussent dans des bacs remplis de solution nutritive. Ici point de paysans. Des milliers d'ouvriers, pour la plupart immigrés travaillent dans des conditions sociales et sanitaires épouvantables. D'année en année, les quantités de pesticides épandues ont augmenté, les ravageurs devenant plus résistants. Jusqu'à ce que le scandale éclate en 2006 : des pesticides interdits sont retrouvés sur des légumes dans plusieurs pays d'Europe, tous provenant.... d'Almeria.

Préserver la qualité de l'eau et de l'assiette

Faut-il davantage d'agriculture biologique et de produits locaux dans les cantines et dans les maisons ? C'est la conviction affichée par des municipalités chaque année plus nombreuses.

L'une des pionnières en Europe, fut la ville de Munich en Allemagne. Voulant préserver la qualité de sa ressource en eau, la ville a acquis il y a 40 ans les terres agricoles de la principale zone de captage qu'elle a reboisée afin de garantir un filtre naturel de l'eau, une idée avant-gardiste à l'époque. 20 ans plus tard, quand la ville détecte un début de pollution d'origine agricole, elle décide d'inciter les agriculteurs de la zone de captage à se convertir au mode de production biologique. Remarquablement visionnaire, la municipalité conduit alors une politique d'ensemble, intervenant directement sur tous les maillons de la filière, de la production à la commercialisation, en assurant des débouchés aux produits biologiques dans ses propres établissements : crèches, cantines… Par ailleurs des aides sont mises en place pour convertir les agriculteurs. Depuis 1991, 83 % des 2.250 ha de terres agricoles sont passés en bio et de 23 en 1993 et ils sont aujourd'hui 107 agriculteurs à pratiquer l'agriculture biologique.
Pour la municipalité, le coût du programme – qui se serait élevé à 0,83 M euros /an (soit 1 centime d'euro par m3 d'eau distribué) - n'est pas excessif dans la mesure où la ville évite de coûteux traitements. A titre de comparaison, le coût de la seule dénitrification est estimé en France à environ 30 centimes d'euros/m3.

En France, la commune de Lons-le-Saunier (39) a repris l'expérience en signant des conventions d'aides financières avec les agriculteurs situés sur le bassin d’alimentation du captage pour protéger la qualité de l'eau distribuée. Dans un premier temps, les conventions ont incité à remplacer le maïs par de l'herbe. A partir de 2002, les agriculeurs ont été encouragés à se convertir à l'agriculture biologique et la commune a développé l'utilisation de produits biologiques dans ses cantines

En Île-de-France, le groupement des agriculteurs biologiques de la région et l'Agence de l'eau Seine-Normandie ont signé le 31 janvier dernier une convention destinée à favoriser le développement de l'agriculture biologique dans les zones de captage d'eau.

En Alsace, les produits biologiques entrent dans les cantines d'un lycée sur trois aujourd'hui. La région souhaite doubler ainsi les surfaces en agriculture biologique en 5 ans.
En Bretagne, la liste des commune adoptant des menus bio à la cantine s'allonge, comme en Rhône-Alpes. Mais la filière bio est peu développée en France. L'aide financière ne suffit pas, il faut accompagner aussi les établissements dans la recherche et la sécurisation de l'approvisionnement.

Les parents d'élèves de leur côté, sont satisfaits. Au niveau national, 78 % des parents souhaiteraient des produits biologiques dans les cantines scolaires, selon une étude du CSA menée en janvier 2008. De même, 43% des Français se disent intéressés par des repas bio au restaurant et 39% des actifs aimeraient se voir proposer des produits bio dans leur restaurant d’entreprise.

Donner un coup de frein à la disparition des petites fermes

En favorisant des approvisionnements locaux, ces politiques menées par les municipalités permettent de redynamiser l'agriculture sur leur territoire, notamment celles exercées par les petites fermes qui fournissent fruits et légumes, lait, oeufs...., et qui disparaissent, même dans les plus gros bassins de consommation.

Ainsi en ouest Ile de France, il ne reste plus que 162 fermes maraîchères contre 619 il y a 20 ans. En Provence Alpes Côte d'Azur, un tiers des fermes a mis la clé sous la porte entre 2000 et 2004.
Pourtant, la tendance est forte chez les consommateurs de retrouver le lien avec ce qu'ils mangent. En témoigne le succès des AMAP -association de maintien de l'agriculture paysanne- où des consommateurs contractualisent avec des producteurs locaux pour leur fournir des produits de saison, cueillis à points et cultivés sans produits chimiques. Leur nombre double tous les 6 mois depuis leur apparition en France en 2001 : 500 en mai 2007, 1000 aujourd'hui... Les paysans y trouvent l'assurance d'une production payée d'avance, ce qui leur permet d'être moins fragiles face à la spéculation immobilière.

Les maisons grignotent en effet les champs. 720 000 ha de terres agricoles ont ainsi disparu entre 1988 et 2000, souvent les plus fertiles. L'extension de cet urbanisme diffus, qui marque aujourd'hui nos paysages, s'expliquent en partie parce que de nombreux Français aspirent à accéder à la propriété d'une maison individuelle, loin des turpitudes de la ville. Mais ce qui était hier une maison en pleine campagne devient un pavillon avec vue sur la route et sur ses voisins. L'espace périurbain s'est étendu de moitié pendant les seules années 1990. Les zones artificialisées ont augmenté de 15 %, ce qui correspond à la surface d'un département français ! Le bitume a recouvert des surfaces qui autrefois captaient les eaux de pluie et de ruissellement, augmentant ainsi le risque d'inondation.

De la délivrance des permis de construire aux politiques d'achat des cantines, les communes ont de nombreux outils d'action

Les maires ont en main des outils puissants de maîtrise de l'occupation des sols, comme le PLU (Plan Local d'urbanisme), qui définit les objectifs politiques des élus et les décline pour aboutir aux règlements et cartes de zonage permettant d’envisager les programmes de construction et de délivrer les permis de construire. Certains maires, comme celui de Verrières-les Buissons, en Essonne, poussés par leurs administrés, contribuent même au maintien d'une agriculture locale et de proximité en louant les terres agricoles appartenant à la commune à des fermiers qui les exploiteront en AMAP.

Ainsi, le pouvoir de choisir sa nourriture dépend aussi des politiques menées par la ville. Pour éviter que le seul approvisionnement possible ne devienne celui du supermarché et d'une agriculture délocalisée de trop piètre qualité, les candidats à nos mairies doivent pouvoir répondre très clairement à des questions simples. Souhaitent-ils préserver une ceinture de cultures maraîchères en agissant sur le foncier et sur l'attribution des permis de construire ? Souhaitent-ils favoriser la relocalisation d'une agriculture de type AMAP en lien avec les consommateurs ? Mettront-ils en place des politiques d'achats publics de qualité dans les services de restauration municipale ? organiseront-ils des marchés de producteurs locaux dans la commune ? Ce sont autant de questions qui peuvent changer la table au quotidien dès demain et améliorer la qualité du lien social et de l'environnement à long terme.

Article rédigé par Isabelle Delannoy eco-echos.com pour Cap21

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